Je ne savais pas trop quel titre mettre à cet article… alors voilà
C’est parti de l’anecdote que j’ai partagée sur facebook concernant notre poubelle de cuisine devenue la caverne d’Ali Baba. En effet, Petit Coeur aime y mettre des objets, des jouets… On y retrouve un couvercle de tup’, un cochon… J’ai donc écrit qu’il allait falloir proposer des jeux de transvasement pour être en phase avec son développement : notion de dedans / dehors, remplir / vider. Je pense aussi qu’il est déjà dans l’imitation. Et puis, c’est quand même vachement rigolo ce couvercle qu’on pousse, qui bascule et se referme
Et l’une de vous m’a demandé ce que je proposais.
Du coup, ça me renvoie à la frustration. Parce qu’on aime pas qu’il joue avec la poubelle (c’est un peu cracra…) et on lui interdit de le faire. C’est frustrant pour lui. Normal. On pourrait s’arrêter là : c’est comme ça, point barre, c’est l’adulte qui décide, faut bien lui apprendre quand même, etc. Et on peut aussi ne pas s’arrêter là et se dire : « ok, tu as envie de faire comme nous. Tu as besoin de vider, remplir, etc. C’est ce que tu expérimentes en ce moment, c’est ce qui t’intéresse ». Et puis se dire aussi : « tu as à peine 1 an, je ne peux pas trop t’en demander ». Trop d’interdits tue l’interdit. Je ne sais plus où j’ai entendu ou lu qu’il ne fallait pas plus de 3 règles. 3, ça fait pas beaucoup ! Et pour moi, c’est incorrect (pour utiliser un mot mesuré) de demander à quelqu’un de faire quelque chose qu’il est incapable de faire : le tout-petit n’a pas le cerveau suffisamment construit (mature) pour être en capacité de respecter autant de règles. Il y en a qui sont non négociables et définitives. Chez les Gazouille par exemple, il est interdit de toucher le four ou la cheminée. Et s’il y a UNE règle que l’on souhaite que Petit Coeur respecte par-dessus tout, c’est celle là. Du coup, concernant les autres interdits, quand c’est possible, on l’oriente vers autre chose pour répondre au besoin ou à l’envie du moment. Apprendre, découvrir, ça doit rimer avec plaisir. L’empêcher de le faire, c’est freiner son développement.
On entend souvent que la frustration est nécessaire. Oui, c’est vrai mais partant du principe qu’il y en a obligatoirement, que la vie nous fruste d’emblée, il n’est pas nécessaire d’en rajouter. A mon sens. Il y a déjà suffisamment de frustrations au quotidien. Par contre, apprendre à l’enfant à gérer la frustration, je trouve ça bien plus intéressant.
Depuis tout petit, quand Petit Coeur fait quelque chose qui nous dérange, on se demande « pourquoi il le fait ? » Quand on trouve une réponse (hypothètique : on n’est pas dans sa tête), on essaie d’y apporter une solution. Exemple, à l’âge de 6 mois environ, il était assis sur mes genoux à table et tirait sur la nappe pour la mettre sur son visage. On a bien cru que la vaisselle allait voler ! Et là, « pourquoi fait-il ça ? » Ce n’est pas pour nous embêter ! (cerveau immature = incapacité à élaborer un stratagème) Peut-être qu’il a envie de se cacher. En même temps, c’est l’âge où la permanence de l’objet se fait (quand quelqu’un ou quelque chose est caché, ça ne veut pas dire qu’il n’existe plus, il peut revenir). Je lui ai alors interdit de soulever la nappe mais lui ai proposé de se cacher avec sa bavette. Ce qu’il a fait.
Il n’a pas le droit de toucher à nos téléphones (vu leur prix…) mais je me mets à sa place : vu le temps qu’on passe dessus, c’est que ça doit être hyper intéressant. Normal donc qu’il ait envie d’y toucher. Idem pour le clavier de l’ordinateur. On lui explique que c’est fragile. ça reste très tentant. Je cherche à acheter une grosse calculatrice. Je me dis qu’appuyer sur les touches, ce sera un peu comme le clavier.
Ouvrir / fermer, c’est également un apprentissage mais tous les placards ne peuvent pas être ouverts. Il y en a, c’est interdit ! Mais il y en a un, c’est autorisé. Il y a dedans toutes les boites plastiques et tous mes moules en silicone. ça n’empêche pas Petit Coeur d’essayer d’ouvrir les autres (eh eh, le filou !) mais au moins, on peut lui dire « ceux-là, tu n’as pas le droit car il y a des choses fragiles, etc., mais si tu veux ouvrir une porte, celle-là tu peux ». Prochaine étape dans quelques mois : ranger avec lui ensuite
Avec notre poubelle, l’idée est la même. Il a une petite poubelle dans laquelle on l’invite à mettre ce qu’il veut, plutôt que dans la nôtre. C’est une règle aussi que de lui demander d’utiliser « sa » poubelle. Mais plus facile à respecter je pense parce qu’elle répond à son besoin / envie du moment. Bon, comme toute règle, il faut du temps pour l’intégrer. Y’a rien de magique dans ma proposition, désolée
Et arrivera un jour où son cerveau sera suffisamment mature pour comprendre ce qu’on met ou pas dans une poubelle. Pour de vrai
Concernant la notion de dedans / dehors, vider / remplir, il y a aussi les jeux de transvasement : les cubes ou formes à mettre dans une boite, ou des boules de coton ou… ce qu’on veut. Mais j’ai l’impression que les objets du quotidien les intéressent souvent plus que leurs jouets
On pourrait se dire que les Gazouille autorisent tout, qu’on est laxistes… moi je dirais plutôt qu’on écoute notre enfant et qu’on lui fait des propositions en rapport avec son âge et son développement. « Il apprend ça ? il expérimente ça ? ok, mais pas comme ça, plutôt comme ça. » A ceux qui trouvent que Petit Coeur n’est pas assez frustré… je me suis déjà exprimé sur la frustration plus haut. Il y en a naturellement et tout n’est pas autorisé à la maison. Il y a des règles, déjà beaucoup je trouve. On va pas en rajouter +++. A quoi ça sert ? vu que c’est impossible pour le tout-petit de toutes les respecter… on va au clash direct et on n’est pas dans le respect de l’enfant…
Et puis, j’ai envie de faire le parallèle avec l’adulte au cerveau « fini » : comment réagit-on face à la frustration ? soit on laisse tomber, soit on porte notre choix sur autre chose (tu la voudrais cette Mercedes classe je sais plus quoi ? Oui mais on n’a pas les moyens. Bon, bah ce sera une Seat ;-)), soit on y revient encore et encore (oui, j’ai été cette relou qui voulait un bébé et n’acceptait pas le « non » de son chéri et qui a insisté jusqu’à ce qu’il dise oui :-D). Pourquoi l’enfant devrait toujours laisser tomber ? Non, il peut apprendre que d’autres choix sont possibles. Et comme l’adulte qui revient à la charge sur un sujet, lui insiste parfois, même si on lui répète « non » (et ce n’est pas de la provocation, c’est normal).
Accepter la frustration, c’est se dire qu’il y a d’autres possibilités, c’est renoncer ou reporter son envie. C’est ça qu’on doit apprendre aux enfants. Selon moi.