Il ne fait pas de colère.
Je préviens : vous risquez d’être déçus en lisant la suite. Si vous pensez que je vais donner une recette magique pour empêcher la colère d’un enfant, passez votre chemin… désolée…
Il ne fait pas de colère.
Je vous rassure, Petit cœur est un enfant comme un autre et oui, il connaît la colère. Nous aussi, on connaît sa colère du coup ! Même si pour l’instant, c’est rare (il a 10 mois).
Mais là où il y a une différence importante pour moi, c’est qu’il ne FAIT pas de colère, il EST en colère, il EXPRIME sa colère.
Faire une colère, cette expression me fait penser à « il fait un caprice », « il fait du cinéma ». ça me fait penser à quelque chose d’infondé, de pas justifié. Alors que si ! L’enfant tire bien sa colère de quelque part. Il a le droit de l’exprimer et il a raison de le faire car c’est important de la faire sortir, de vider son sac émotionnel, pour être plus serein ensuite.
Pour être la plus bienveillante possible, je me mets souvent à la place de l’enfant (qu’est-ce qu’il pense ? comment vit-il cela ? comment le ressent-il ?) et je fais le parallèle avec l’adulte. Pourquoi se permet-on des choses avec l’enfant et pas avec l’adulte ? On ne sentirait pas les fesses d’une personne âgée dépendante pour savoir si c’est elle qui a fait dans sa couche ? Pourquoi le faire à l’enfant ? (cf. mon article « on ne sent pas le cul des gens« ). On ne dirait pas à son conjoint : « tu fais une colère parce que j’ai oublié notre rdv ? ». Pas sûr qu’il le prendrait bien. Pourquoi alors, le dit-on de et à l’enfant ??
C’est normal quel que soit l’âge de ressentir de la colère. C’est justifié, même si c’est pour un biscuit cassé et que pour nous, c’est « rien ». Ce n’est pas « rien » pour l’enfant (jamais !) et souvent, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase (comme chez nous adultes !), d’où l’importance de permettre à l’enfant de vider son sac émotionnel (= son vase).
Oui, il faut qu’il exprime ses émotions, la colère aussi. Il ne faut surtout pas lui dire d’arrêter de pleurer, crier, d’être en colère. Il n’est pas méchant, vilain ou autre quand il est en colère. Il est lui. Lui qui, à un moment ressent de la colère et ne sait pas quoi en faire. Souvent, chez le petit, ça déborde, ça prend des proportions énormes, ça le dépasse. Il a besoin d’aide. Rappelons qu’il est tout petit. L’adulte qui pète un plomb, tape dans un mur, aurait le droit ? N’est-il pas capable de gérer ses émotions ? ne devrait-il pas faire preuve de davantage de maturité ? Dirait-on de lui qu’il FAIT une colère ?
L’enfant doit pouvoir exprimer sa colère. Mais il ne peut pas le faire n’importe comment et c’est à nous de les accompagner pour leur apprendre à le faire : « on ne jette pas ses jouets partout ». Besoin de se défouler : cours dans le jardin, tape dans le ballon / dans le coussin, mords doudou, etc.
Besoin de crier : crie dans le coussin, dans telle pièce (si c’est ok pour vous), etc.
Il faut que ça sorte, sinon ça restera au fond de lui et ça amplifiera (une goutte + une goutte + une goutte et… vous voyez).
ça me fait penser à une maman que j’ai rencontrée dernièrement en formation et dont j’ai aimé sa vision de la frustration « nécessaire » à l’enfant :
« quand on nous dit : « il faut que l’enfant connaisse la frustration, il faut le frustrer, etc. » mais il naît frustré ! La vie, le quotidien, ça le frustre. In utéro, il avait tout ce dont il avait besoin, tout de suite. La frustration est donc là. Pas besoin d’en rajouter. »
Comme je suis d’accord ! Notre rythme de vie, nos conditions de vie, nos codes sociaux, etc., sont autant de règles et contraintes qu’il doit découvrir. C’est frustrant. De base. Pourquoi vouloir le frustrer volontairement ? ça aurait presque un côté sadique… laissons faire les choses d’elles-mêmes. C’est déjà bien assez compliqué pour le tout-petit (et pour nous).
Il existe d’autres outils pour accompagner la colère de l’enfant mais mon article serait trèèès long. L’article « 18 pistes pour accompagner les colères des enfants avec bienveillance » est top ! Mais le but de celui-ci, c’est de dire « attention ! » aux expressions. Personne (ni enfant, ni adulte) ne FAIT une colère. Il est en colère. Il exprime sa colère.
C’est pas anodin. Ce ne sont pas que des mots. Car cette expression, elle est pleine de sous-entendus et on les renvoie à l’enfant quand on l’utilise.
Je vais être honnête : je l’ai souvent dite. Mais depuis cette prise de conscience, je me bats contre mon naturel qui reviendrait au galop, formatée par cette expression devenue courante, qu’on banaliserait du coup et qu’on emploie spontanément. Non, je ne veux plus l’utiliser. Je veux que Petit Cœur s’autorise à avoir des émotions, quelles qu’elles soient et qu’il les exprime. Je ne veux pas qu’il en ait peur ou honte. Je ne veux pas qu’il culpabilise de ce qu’il ressent. Je veux pouvoir accueillir ses émotions, même si parfois ça me coûte énormément. Je veux qu’il ait confiance en moi et qu’il sache qu’il n’y aura pas de barrière. Je ne sais plus dans quel livre j’avais lu qu’on se plaint que nos ados ne nous confient rien mais si, lorsqu’ils étaient petits, on leur demandait de se taire, d’arrêter d’exprimer une émotion, comment attendre d’eux plus grands qu’ils fassent différemment ?
Voilà, c’était ma réflexion du jour. Alors, pas trop déçus ? 😉